Le futur des produits de grande consommation, les fameux PGC, tient dans une poche. Le SIAL 2014 a mis en lumière ce potentiel d’innovation à travers l’une de ses tendances, que nous considérons, d’un point de vue personnel évidemment, comme étant la plus lourde et la plus pertinente au regard de l’évolution actuelle de notre société de consommation (et particulièrement des pays émergés, terme étrange au regard de la sur-émergence de certains pays dits émergents comme la Chine ou le Brésil). Cette innovation est le « produit-dose », bâtie autour d’un concept fort : la juste dose d’un aliment au juste moment (le juste moment représentant un environnement de consommation où l’utilisation de la dose a tout son sens).
Son potentiel est inversement proportionnel à sa taille. Innovation banale au premier coup d’œil, qui s’apparente à réduire le format du produit et à le packager spécifiquement. Banal mais spectaculaire. Le concept de juste dose est en phase avec les nouvelles contraintes que le consommateur rencontre aujourd’hui : contrainte économique, contrainte environnementale, contrainte pratique et même contrainte hédonistique.
Une réponse efficace à la contrainte économique
Le contexte économique actuel est difficile pour les ménages, nous entendons et voyons quotidiennement l’impact de la crise sur nos vies quotidiennes. Cela est enfoncer des portes ouvertes en disant que notre pouvoir d’achat a baissé, que la contrainte sur les ressources et matières premières alimentaires est grandissant, entraînant mathématiquement l’inflation de leurs cours et augmentant le prix des produits finis. Même si la crise alimentaire mondiale de 2007 et de 2008 a provoqué des émeutes de la faim uniquement dans les pays les plus pauvres, elle ne peut ne pas être prise en compte. Ces crises alimentaires ont d’ailleurs touché nos consciences collectives, il suffit de taper sur google « crise alimentaire mondiale » pour voir s’afficher fatidiquement l’année 2014.
Le budget alimentaire est en faible hausse, mais c’est surtout la perception de ce budget alimentaire qui inquiète le consommateur. Celui-ci est convaincu qu’il augmentera irrémédiablement dans les mois prochains, que vous traitiez avec le consommateur français, canadiens ou espagnols.
Cette crise économique, qui, depuis le temps qu’elle dure, devrait porter le nom de mutation (Michel Serres l’a si bien dit : « Ce n’est pas une crise. C’est un changement de monde »), a fait éclore une pléthore de comportements malins que le consommateur français déploie tous les jours, et qui, aujourd’hui, sont rentrés dans les mœurs. Quelles sont ces nouvelles habitudes d’achat qui impliquent une meilleure gestion de notre budget alimentaire ? Acheter en promotion, comparer les prix sur internet grâce à l’entrée du digital dans notre quotidien, faire des arbitrages (acheter les produits « impliquants » premium et le reste mois cher en MDD), cuisiner à la maison pour éviter d’aller au restaurant, ne pas jeter les restes du dîner du soir mais les sublimer pour en faire un lunch, acheter directement au producteur, grouper plusieurs ménages et acheter en commun… Les industriels répondent parfaitement à ces nouveaux besoins, tout comme certaines entreprises qui ont imaginé des nouvelles approches de business plan plus que pertinentes (La ruche qui dit oui, mon-marche.fr). D’autres prônent des méthodes alternatives comme la production à la maison (pour citer le projet Window Farm) ou des démarches philanthropes (Incredible Edible, Partage ton frigo). Les distributeurs ne sont pas en reste : le concept du Drive qui empêche les achats d’impulsions, les fruits et légumes moches ou la vente express avec un rabais conséquent accordé aux produits qui périment le jour même.
La liste est si longue qu’un article ne suffit pas, à vous d’être à l’écoute ! Le constat est clair : la crise économique ne tarit par l’innovation en agroalimentaire mais la diversifie tout en lui faisant emprunter des chemins différents.

Pourquoi des produits doses et pas des produits grands formats ? Tout est question de gaspillage, cet horrible phénomène que tous montrent du doigt et dont nous sommes tous coupables (Sénèque dans la Vie Heureuse : « Vous vous moquez de ceux qui ont boutons, mais vous, vous êtes tous couverts d’ulcères ». On est très citation ces derniers temps). Mais courage camarade lecteur, demain tous les produits en juste dose te permettront de te laver de tous ces péchés de gaspillage qui alourdissent ton cœur (ou pas). Rien n’est pire que le gaspillage alimentaire en temps de crise : un produit alimentaire gaspillé est un produit que l’on aura toujours payé trop cher. Or, si l’on s’intéresse aux raisons du gaspillage (d’après une étude que je ne peux mettre en ligne sous peine de rupture de confidentialité), une grande partie est due à un décalage entre nos comportements de consommation et nos comportements d’achats, ou plus simplement au fait que l’on ne consomme pas, ou pas bien, ce que l’on achète. Nous ne consommons pas tout ce qui a été acheté en grand format. Le produit périme, moqué par ses compatriotes de frigidaire, et se voit au final gaspillé. Pire, certains produits sont achetés et à peine ouverts par un consommateur à la volonté fragile, et dont la main qui l’a retiré du linéaire était animée d’une impulsion irréfléchie, d’un besoin de plaisir et d’évasion à la profondeur abyssale (pour tous ceux qui n’ont jamais ressenti la force mobilisatrice d’un achat d’impulsion, nous vous conseillons un tour chez les Frères Tang, aux linéaires remplis de trésors exotiques et secrets, mais trop souvent déroutants). Ce comportement malin d’acheter en trop grande quantité entraîne le plus souvent un gaspillage par ce décalage entre achat et consommation : il rentre en concurrence avec une logique économique qui prône l’anti-gaspillage. Il n’a donc pas d’avenir.
Il n’existe pas encore un marché structuré de seconde main pour les aliments, entendez un marché où se vendent des aliments déjà utilisés, c’est-à-dire un marché de restes. Et même si des petits malins y travaillent, la distance à parcourir pour que ce marché se développe et se démocratise est si grande que nous espérons voire la crise économique se résorber d’ici là.
L’achat de produits en gros n’est pas une réponse pertinente aux nouvelles contraintes économiques, le produit dose oui ! Mathématiquement, baisser la quantité de produit proposée implique une diminution de prix et évite le gaspillage pour une meilleure gestion de son budget alimentaire.
Ainsi acheter un pot de miel entier dont vous n’êtes pas spécialement consommateur tous les jours devient une aberration, au regard du prix qu’il faut mettre et du gaspillage certain qu’implique vos habitudes de consommation très ponctuelles de ce produit. Heureusement, l’entreprise anglaise Rowse Honey LTD a pensé à vous en proposant ce mini-format de 43g (au lieu du 200g ou 500g traditionnellement rencontré) à un prix beaucoup plus abordable.
De même, Charal a pensé à vous en proposant des steaks en format de 80g au lieu de 100g, plus adapté aux petits appétits et aux enfants. Le prix est plus économique (la viande coûte et va coûter de plus en plus chère), et ce format évite le gaspillage.
Deux autres comportements ont aussi émergé et s’opposent par la démarche : acheter en gros et acheter en petite quantité. Les industriels ont répondu présents face à cette demande du consommateur qui se traduit par ces deux comportements distincts : le retour au plat familial, de plus gros conditionnement, des produits qui se conservent plus longtemps et, bien évidemment, les produits doses.
Mais alors, face à ce concurrent qu’est l’achat en gros, comment ose t-on affirmer que les produits de grande distribution de demain seront tous des produits doses ? Et pourquoi pas des produits en gros ? C’est là, où dans un geste théâtral et travaillé, nous abattons notre dernière carte, ou dernier comportement malin, le plus important à retenir d’ailleurs.